La Colère

Il n’y a pas meilleur enseignant que la vie elle même. Il suffit d’avoir une réelle volonté de comprendre et de souhaiter ne plus souffrir. Il nous faut observer, analyser, faire des rapprochements, s’interroger. Toutes les réponses sont là. Ne pas avoir peur de lâcher ce que l’on trouve rassurant mais qui nous empêche d’explorer d’autres horizons.

Si en plus nous avons la chance de rencontrer des enseignants reconnus et des interprètes  performants alors nous pouvons avoir des réponses avant de se poser les questions et le chemin se fait plus rapidement. Je remercie plus particulièrement Jigmé Rinpoché, Sage Tibétain, dont la principale préoccupation est de trouver les mots justes et les méthodes pour que nous puissions comprendre la véritable nature de notre esprit. Je n’ai pas les compétences ni la clarté nécessaire. Néanmoins sur la base de ce que je pense connaître à ce jour, j’ai rédigé ces quelques explications.  Si vous les lisez c’est qu’elles auront été revues par des enseignants formés par Jigmé Rinpoché. Face à la souffrance causée par la colère, puissent ces quelques lignes, apporter un début de réponse.

C’est le ressenti que l’on a lors d’une émotion qui nous fait souffrir pas l’émotion par elle même.

La colère génère de la souffrance. Souffrance pour celui qui se met en colère mais aussi pour celui qui reçoit les effets de cette colère. Est ce l’émotion qui est un problème ou plutôt la souffrance qui émerge du fait de se laisser entraîner par l’émotion, de la saisir et de réagir sur cette base par des pensées et des actes du corps et de la parole?

Nous nous mettons en colère lorsque « Moi » se sent agressé, humilié, lorsque l’on envahit « Mon » espace, lorsque « Moi » est dérangé parce que les choses ne se passent pas comme « Moi » le souhaiterait. On peut remarquer qu’il nous est assez désagréable de penser que nous pourrions avoir des défauts. Lorsque nous éprouvons une souffrance quel qu’elle soit on dirait que nous nous sommes programmé à penser que nous ne pouvons pas en être la cause. Par conséquent elle est causée forcement par quelqu’un ou quelque chose d’autre.

Nous avons tendance à penser que cette émotion est générée par quelque chose d’extérieur, le mari qui n’a pas rangé ses chaussures, l’enfant qui ne mange pas, le marteau qui nous écrase un doigt ou la porte du placard qui nous cogne la tête.

Mais cette version ne supporte pas l’analyse. C’est une grande chance d’ailleurs, car il est plus facile de travailler sur nous même que d’éliminer toutes les supposés sources extérieures de souffrances sur lesquelles nous n’avons aucun pouvoir. Si la colère venait de « l’autre » à quoi bon aller voir un psy dans l’espoir de se soigner ? Ce serait  absurde. Pourrions nous aussi réussir à faire soigner le marteau?

La colère est une émotion et comme toutes les émotions, elle ne peut pas venir de « l’autre » ou « d’autre » chose. Tout d’abord parce que l’on voit bien qu’un jour le mari qui laisse trainer ses chaussures va nous laisser indifférente, alors que le jour suivant nous allons être folle de rage après lui. Un jour l’enfant qui ne mange pas nous rend fou, le jour d’après on est plein de compassion et l’on cherche à savoir pourquoi.

On n’a jamais vu non plus de marteau décider tout seul de venir nous écraser le doigt.

Les exemples sont multiples et l’on peu se rendre à l’évidence que si la cause de notre souffrance était l’autre ou autre chose que nous même, elle produirait le même effet quelque soit le jour ou les circonstances.

Prenons un papier blanc sur lequel nous aurions écris avec du jus de citron ou de l’encre invisible, regardons la feuille avec une lumière derrière. Les inscriptions apparaissent. Est ce la lumière qui a écrit sur la feuille ? Non la feuille était déjà écrite, La lumière n’a été que le révélateur. Et bien pour la colère c’est identique.

Ce n’est pas l’autre qui nous met en colère, il n’est pas responsable de notre colère, il n’est que le révélateur de cette émotion qui émerge de nous.

L’espace temps entre l’action faite envers nous et le ressenti de la colère est tellement petit, que nous avons l’impression que c’est l’action qui a provoqué la colère.

Or il n’en est rien. Prenons cet autre exemple : Une personne que l’on croise dans la rue, nous insulte. Cela nous provoque immédiatement de la colère, mais décomposons ce qui s’est vraiment passé.

Cette personne que l’on ne connaît pas émet un son, c’est une onde, que notre oreille perçoit. A cet instant, cette onde ne nous a pas fait de mal, elle ne nous a pas arrachée l’oreille.

L’instant suivant notre conscience mentale détermine que cette onde est tel mot, l’instant encore suivant, notre mental identifie cette information à partir de notre base de données (appelée :conscience base universelle) en l‘associant à nos expériences passées, nos conditionnements, provenant notamment de notre éducation, etc.. nous allons déterminer que ce mot est une insulte et ensuite émettre un  jugement.

C’est seulement lors de l’instant suivant que nous allons avoir un ressenti négatif. Nous voyons bien que l’insulte ne mène pas instantanément au ressenti, mais que le processus est une succession d’instants très brefs qui débouche sur ce ressenti.

Ce ressenti nous est propre.

En effet le même mot entendu au même instant par une autre personne, ne va pas être ressentit de la même façon. Cela montre bien que  nous sommes seuls responsables de l’émotion que nous ressentons. Les éléments extérieurs ne sont que des révélateurs de se petit dysfonctionnement. C’est cette méprise, cette erreur d’analyse, cette ignorance de comment fonctionne notre esprit qui nous fait souffrir.

Quelle différence cela fait il ? Elle est très importante. Reprenons l’exemple de l’insulte, dans le premier cas si nous prenons pour responsable de notre colère (souffrance) la personne qui a émise cette insulte, nous allons répondre avec agressivité et peut être que cela se finira en bagarre. Ou alors on va se raisonner et réfréner sa colère. Il s’en suivra alors une grande frustration qui peut même avoir des conséquences physiques. Dans le second cas, ayant compris et intégré que notre souffrance ressentie n’est générée que par notre propre fonctionnement basé sur la méprise, il n’y a pas de raison d’être agressif envers l’autre.

Au contraire nous pourrions le « remercier » de nous faire prendre conscience que nous avons encore à travailler sur notre compréhension du fonctionnement des émotions, de notre propre fonctionnement.

Dans l’idéal, nous pourrions même éprouver de la compassion envers cette personne qui doit être dans une grande souffrance pour prodiguer des insultes sans qu’il y ait de raison.

Toutefois on ne dit pas qu’il faille tout accepter sans rien dire. Mais il y a une grande différence entre sanctionner parce qu’il y a eu faute et sanctionner parce que cela nous a énervé, mis en colère.

Lorsqu’un enfant fait une bêtise et que cela fait dix fois que vous lui dite « NON », vous êtes bien énervé et finalement vous le punissez.

On a tous remarqué, alors, que la punition est disproportionnée par rapport à la bêtise commise. Par contre elle est à la hauteur de notre degré de colère. On ne développera pas ici les conséquences de cette méprise, comme le fait que l’enfant, lui, a ressenti la vraie raison de la disproportion de la sanction, ou la culpabilité que l’on ressent après une telle sanction.

On entend souvent qu’il ne faut pas se mettre en colère que c’est néfaste pour nous, dans cette vie mais aussi pour nos vies futures. Toutefois avez vous remarqué comme il est difficile de réfréner sa colère. Dans un premier temps il faut être conscient de ce qui est entrain de se passer, déjà cela demande de l’entrainement, puis ensuite se raisonner, et se raisonner encore lorsque la frustration nous envahit. Alors les bons coachs en relations humaines vont vous donner des techniques efficaces pour qu’un entretien ou une réunion se déroule correctement, mais ce n’est que du court terme et l’on va accumuler énormément de frustration qu’il va falloir faire sortir un jour ou l’autre. On voit bien qu’il très très difficile de réfréner sa colère.

A l’inverse, grâce à la compréhension fine de comment s’élève une émotion, la compréhension que ce ressenti est néfaste pour nous et pour les autres, il va s’en suivre la prise de conscience qu’il serait important, presque vital de choisir de travailler sur notre façon de voir et d’agir autrement.

Alors à chaque fois que la colère va s’élever, nous allons déjà nous en rendre compte, et ce de plus en plus tôt, alors qu’auparavant cela nous paraissait normal, c’était notre « caractère »

Nous serons à même d’observer ce qui se passe et analyser, décomposer la situation, pour finalement réaliser consciemment que l’autre ne porte pas la responsabilité de notre colère. Et petit à petit nous n’allons plus réfréner cette colère parce que dans les mêmes circonstances, ce ressenti va de moins en moins s’élever. Cette prise de conscience nous permet d’avoir plus de clarté et de compréhension dans les situations de colère, ce qui nous permettra de ne pas être dominé par cette émotion et d’avoir la capacité de l’amener dans une direction positive. Toutes les situations émotionnelles deviennent donc une opportunité d’entraînement à des qualités positives

Interrogeons nous sur qui ressent de la colère ? « MOI » Encore ce « MOI ». Imaginons, dans un monde idéal, imaginaire, que nous puissions faire complètement abstraction de nous même pour ne penser qu’a « L’AUTRE » uniquement à « L’AUTRE » que « L’AUTRE » soit vraiment satisfait, obtienne ce qu’il désire. Si nous ne pensions pas du tout à nous (toujours idéalement), nous nous rendrions compte que si nous n’avions pas une once de pensée pour nous, mais que ces pensées étaient tournées vers l’autre, alors nous ne serions pas affectés, nous ne pourrions plus souffrir et c’est l’amour et la compassion véritable, qui prendraient la place de la souffrance.

Sans chercher à le faire, nous pourrions déjà y réfléchir intellectuellement, pour découvrir la logique de cette réflexion. Cela nous aideraient à comprendre que l’émotion ne peut pas venir d’ailleurs que de nous mêmes.

Nos relations avec les autres vont s’en trouver immédiatement améliorées.

La vie sera beaucoup plus calme, il y aura moins de peurs, peur des autres mais peur de soi aussi.

Une fois que nous aurons pris conscience de la véritable nocivité de la colère et que nous aurons développé un réel désir de travailler dessus, la méditation est un excellent moyen pour acquérir la clarté et la stabilité qui nous permet de ne plus réagir d’une manière reflexe, instantanément face à une situation qui provoque notre colère.

La méditation va permettre le recul suffisant pour analyser ce qui est entrain de se jouer. Alors petit à petit notre habitude de fonctionner va se transformer.

C’est un processus qui prend du temps. Tout dépend du degré d’implication que nous sommes prêts à investir. Ceci étant le chemin est passionnant.
Puisse la lecture de ces quelques lignes, donner envie de mieux connaître le fonctionnement de l’esprit afin de petit à petit se libérer définitivement de la souffrance.